You are not logged in.
Même si je n'ai pas eu le temps de le chercher, ce truc est paraît-il introuvable en France, même sur internet. Dommage, d'après cet article du courrier international que j'ai retrouvé il y a quelques temps, ça avait l'air sympa.
JAPON
Une décadence sociale illustrée
Shukan Asahi (Tokyo)
Une société sous surveillance. Des jeunes qui reçoivent un préavis de mort et qui n'ont plus que vingt-quatre heures à vivre. Tels sont les ingrédients d'une bande dessinée à succès qui traduit le malaise de la société nippone.
La sonnette d'une maison retentit brusquement en pleine nuit. "Je suis M. Fujimoto, du service d'état civil de la mairie", annonce le visiteur. L'air inquiet, une femme ouvre la porte. Il n'y a aucune raison pour qu'un fonctionnaire se présente à une heure aussi tardive. A moins que ce ne soit pour lui remettre... "Je suis venu vous apporter le 'préavis de décès' du jeune Yosuke", lui annonce de but en blanc M. Fujimoto. Dans le langage courant, on parle d'ikigami [avis de mort]. Aux termes de la Loi sur le maintien de la prospérité nationale, tous les enfants de "ce pays" qui entrent à l'école primaire doivent être vaccinés. Le produit qu'on leur inocule renferme une substance spéciale susceptible d'entraîner la mort, à une date et une heure programmées à l'avance, d'un jeune sur mille dans la tranche d'âge de 18 à 24 ans. Les individus ainsi sélectionnés reçoivent un ikigami vingt-quatre heures pile avant leur mort.
Ikigami est un manga qui paraît en feuilleton depuis janvier 2005 dans l'hebdomadaire Young Sunday édité par Shogakukan. Il décrit les dernières vingt-quatre heures des jeunes frappés par l'"avis de décès" à un âge où l'on déborde habituellement de vitalité. En toile de fond, l'auteur évoque les tourments vécus par Fujimoto, l'homme chargé de délivrer l'ikigami. Quant à Yosuke, victime de terribles brimades au lycée, il a quitté l'école à 16 ans pour travailler dans une supérette. Quatre ans plus tard, il a toujours des séquelles physiques et morales de ces brimades et décide de consacrer les dernières heures de sa vie à se venger de ses agresseurs. Il commence par violer une de ses anciennes camarades, qui avait pris des photos de la partie inférieure de son corps dénudée, et il photographie à son tour la scène. Puis il s'en prend au "principal coupable", qui travaille comme stagiaire dans un salon de coiffure, en lui transperçant la main avec un couteau de cuisine pour qu'il ne puisse plus se servir de ciseaux. Mais cela ne suffit pas à assouvir son désir de vengeance et il ne lui reste plus que six heures à vivre.
Les autres personnages qui ont reçu un ikigami à ce stade de la publication sont un aide ménager dans une maison de retraite, une directrice adjointe d'une société de production de télévision qui se drogue, un musicien des rues, un jeune qui vit confiné chez lui, et le frère d'une aveugle qui, à la mort de leurs parents, a été séparé d'elle et placé dans un autre établissement spécialisé. Tous ces jeunes sont en proie au désarroi et à une colère qu'ils ne peuvent déverser sur personne, mais ils finissent par accepter leur destin et vivre intensément les quelques heures qui leur restent. Ainsi, bien qu'il ait décidé de lui léguer ses cornées, le frère cache jusqu'à sa mort l'existence de l'ikigami à sa soeur.
Une base de résistance contre le fascisme
Ce genre d'épisodes inspire la sympathie. Selon Junichiro Tanaka, l'éditeur du manga, les trois albums déjà parus se vendent bien, et des contrats de publication ont été signés avec la France, la Corée du Sud, Taïwan et l'Italie. L'auteur, Motoro Mase, 37 ans, s'exprime en pesant soigneusement chaque mot. "Il n'est pas facile de vivre dans notre société, mais, puisqu'on est venu au monde, il faut vivre le plus intensément possible, et cela en vaut la peine. C'est ce que je souhaite faire passer", explique-t-il. L'idée de cette oeuvre lui est venue à l'été 2004. "J'ai pensé à l'akagami [avis rouge ; nom donné pendant la guerre à l'ordre d'incorporation]. Je me suis demandé comment réagiraient les jeunes d'aujourd'hui s'ils en recevaient un", se souvient l'auteur. Un peu plus tard, en octobre 2004, il y a eu l'enlèvement et l'exécution par un groupe armé en Irak de Shosei Koda, un jeune de 24 ans. "Le gouvernement a sans doute fait tout ce qui était en son pouvoir, mais comme le Premier ministre de l'époque, Junichiro Koizumi, avait réaffirmé que le Japon ne cédait pas au terrorisme, le jeune Koda n'a pas pu être sauvé. A l'époque, je me suis dit qu'il pouvait arriver que la vie d'un individu soit sacrifiée au nom de l'intérêt national. J'ai été très marqué par le climat qui régnait alors. Aujourd'hui, au Japon, tout le monde éprouve un sentiment d'étouffement. Les gens sont également préoccupés par leur avenir, qui s'annonce plutôt sombre. J'ai pensé que, si l'histoire se déroulait dans une société extrêmement contrôlée, le lecteur sentirait mieux cette atmosphère. C'est pour cette même raison que j'utilise l'expression "ce pays" pour en désigner un imaginaire qui ressemble à s'y méprendre au Japon", ajoute Motoro Mase.
La rédaction de Young Sunday croule sous les courriers de lecteurs. "Ce que j'aime, c'est le réalisme qui se dégage du contraste entre le caractère irréel de l'intrigue et les descriptions détaillées de la vie réelle", écrit un jeune âgé de 23 ans qui vit d'emplois précaires. "A une époque où les gens sacrifient facilement leur vie, il me semble que cette histoire nous enseigne la valeur de la vie humaine, le sens de l'existence", décare une femme au foyer de 33 ans. Un grand nombre de lecteurs disent avoir pleuré, une réaction que l'auteur accueille avec un sentiment mitigé. "D'un côté, je suis content, mais, en pleurant un peu naïvement, on tombe dans le piège de la Loi sur le maintien de la prospérité nationale. Un texte qui proclame la primauté de la vie tout en ôtant celle de jeunes citoyens est l'incarnation même de la contradiction. J'aimerais qu'on éprouve aussi une sensation de malaise après la lecture", dit-il.
Sur le bandeau du deuxième volume de la série, on peut lire un commentaire de Masaru Sato, surnommé le "Raspoutine du ministère des Affaires étrangères" et auteur de Kokka no wana [Le piège de l'Etat]. "Existe-t-il une oeuvre qui exprime avec autant de force l'abomination de l'Etat et la primauté de la vie ?" s'interroge-t-il. M. Sato éprouve de la sympathie pour Fujimoto, qui effectue ses livraisons aberrantes de préavis de décès - son travail - sans les remettre ouvertement en question. "Pour nous, les akagami appartiennent à un lointain passé. L'élimination d'une partie de la population en vue d'inculquer le respect de la vie nous semble plus réelle. Si on pousse plus loin notre société sous surveillance, on arrivera à la situation décrite dans Ikigami. Si le fascisme devait s'installer, la répression s'exercerait immédiatement contre ce type de manga. On le présenterait comme un ouvrage décadent, manquant de sérieux et tournant l'Etat en ridicule. Mais, en même temps, il deviendrait une base de résistance contre le fascisme", assure-t-il.
Motohiro Iwada et Satoshi Nakamura
Encadré(s) :
L'auteur
Courrier international
Né en 1969, Motoro Mase entre dans une entreprise après des études universitaires, puis la quitte au bout de quatre ans pour aller étudier le cinéma à Londres. C'est à cette époque qu'il crée AREA, sa première oeuvre de manga, qui lui vaudra de recevoir le prix du Jeune Auteur de manga, décerné par l'éditeur Shogakukan. Le premier volume d'Ikigami paraîtra en France à l'automne 2007, aux éditions Kabuto.
LE MOT DE LA SEMAINE
"SHINIGAMI" : LE DIEU DE LA MORT
Kazuhiko Yatabe
Kawaii ! Vous avez sans doute déjà entendu de jeunes Japonaises s'extasier de la sorte devant la vitrine d'un magasin de mode parisien. Cette exclamation - "C'est mignon !" - est porteuse d'une vision du monde dont sont redevables des icônes (à commencer par la célèbre Hello Kitty), des courants artistiques (le néopop de Takashi Murakami) et, bien entendu, le vaste domaine des mangas. Contrairement à ce que l'on pourrait penser au premier abord, cette façon de déclarer adorable ce qui se présente à soi ne relève pas d'un attrait frivole pour le superficiel. Dans le Japon d'aujourd'hui, elle s'apparente davantage à un réflexe de défense de la part des plus faibles socialement, et en particulier des adolescentes ; c'est une forme de désespoir qui consiste à gommer, à leurs dépens, les souffrances causées par le monde actuel. En ce sens, la conscience du kawaii va de pair avec celle de la mort - cette mort qui a été mise en scène dans le film Battle Royal (2000), et, tout récemment, dans Ikigami, une BD évoquant un pays qui, en vertu d'une loi, met en place une politique de vaccination obligatoire chez tous les enfants, de façon qu'un individu sur mille meure une fois parvenu à l'âge adulte. Deux constantes dans ces oeuvres : en guise de shinigami (dieu de la Mort), des humains, regroupés ou non sous un régime totalitaire ; une trame narrative qui ne permet pas de remettre en cause le système de distribution sociale de la mort. Pas d'issue, ni du côté de la fiction, ni du côté du réel, semble nous dire la culture pop japonaise...
The sky is blue and all the leaves are green.
The sun's as warm as a baked potato.
I think I know precisely what I mean,
When I say it's a shpadoinkle day.
Offline
Je confirme, je connais pas de sites, mais sur la muuuuuule c'est possible.

Offline
Question toute con: pourquoi séparer les séries de ce post: http://papytromblon.free.fr/upload/viewtopic.php?id=200 ???

Offline
Tout simplement parce que je suis distrait... J'avais oublié que je pouvais poster cet article sur ce topic 
The sky is blue and all the leaves are green.
The sun's as warm as a baked potato.
I think I know precisely what I mean,
When I say it's a shpadoinkle day.
Offline
oui ca a l'air prometteur, on dénote une certain ressemblence avec old boy, dans lequel si je me souviens bien un des themes sous jacents etait que le mec libéré prenait conscience de l'importance de sa vie et devenait un élément actif de cette société kil parasitait a l'epok.
et puis le terme ikigami n'est pas sans me rapeler les shinigami dans bleach, vous me suivez?
Offline
Question toute con: pourquoi séparer les séries de ce post: http://papytromblon.free.fr/upload/viewtopic.php?id=200 ???
Ben parce que je suppose que le lien dans historiographie c'est pour le manga papier et qu'ici on est dans les videos.

Offline
[ Generated in 0.012 seconds, 7 queries executed - Memory usage: 540.96 KiB (Peak: 557.07 KiB) ]